Christian Le Pape a créé en 1990 le Pôle Finistère Course au Large. Pépinière de la voile en solitaire, elle a fait naitre les meilleurs skippers au monde. Pas un podium n’a échappé à un coureur du Pôle sur la Solitaire du Figaro depuis 2002 et tous les vainqueurs du Vendée globe depuis 2000 et Michel Desjoyeaux sortent des bancs de l’école de Port La Forêt. Alors, forcément, un jour Damien a été tenté d’intégrer lui aussi le Pôle pour bénéficier de cette énergie d’équipe et pouvoir s’entrainer avec les meilleurs. Anne le Cam, épouse de Jean qui préparait alors le bateau de Damien a fait l’entremetteuse et Christian Le Pape et son équipe ont ouvert en grand les portes au Groupe APICIL de Damien.
C’était en 2018, le skipper venait d’acheter le bateau et se préparait pour la Route du Rhum. A partir de là, il a pu participer à plusieurs stages d’entrainement avec les meilleurs 60’. Loin de faire le timide avec son monocoque à dérives, Damien s’est confronté à ces bateaux plus véloces et équipés de foils dernière génération aux mains des marins les plus en vue. Il a continué d’apprendre à leurs côtés. Aujourd’hui, le premier skipper handisport force l’admiration de Christian Le Pape qui a observé à la loupe sa course. Les deux hommes ont même beaucoup échangé pendant le tour du monde. L’occasion pour Christian Le Pape d’en apprendre encore un peu plus sur le sportif et surtout sur l’homme. A quelques jours de l’arrivée de ce Vendée Globe, il nous livre un regard plein d’admiration et de reconnaissance sur Damien
Interview de Christian Le Pape :
« Il y a beaucoup de choses à dire sur Damien. Le Vendée Globe n’est pas fini mais déjà, on peut dire que Damien a fait preuve de constance, de sérénité et d’adversité. Il a aussi partagé sa bonne humeur et son plaisir d’être en mer ce qui a contrasté avec certains leaders qui se sont plaints davantage.
Forcément, c’est plus facile de tenir ce positionnement quand on n’est pas forcément attendu à ce niveau de la course, quand on est un vrai outsider. Jamais on n’aurait pu imaginer qu’il joue le podium avec le bateau dont il disposait. Or, c’est ce qu’il a fait à de multiples reprises pendant la course. Damien est quelqu’un qui prend toujours les choses dans le bon sens, de manière pragmatique. Il a vraiment été bon dans l’environnement dont il a pu disposer.
On peut toujours chercher à relativiser, se dire que la météo était particulière, dire aussi que certains foilers ne naviguent pas à 100% mais d’autres skippers qui ont des bateaux plus performants, ne sont pas là. Vraiment, il faut aller le chercher ce résultat ! Damien est super bon ! C’est un bizuth avec des qualités de résistance mentale exceptionnelles. C’est hors du commun. Or, dans le Vendée Globe, beaucoup de choses se jouent dans la tête. C’est passionnant ce qu’il réalise. Nous avons beaucoup échangé pendant ce Vendée Globe. Je tenais à lui dire que nous étions particulièrement fiers de ce qu’il réalise, fier qu’il fasse partie de l’équipe.
Avec ses dérives droites, pendant les entrainements face aux foilers, certains auraient pu imaginer que Groupe APICIL n’était là qu’en décoration… Mais ce n’est pas ça le Vendée Globe, ce n’est pas que de la performance pure ou que de la technologie.
Naviguer avec une main en moins, ce n’est pas neutre ! Ramener en pleine nuit un gennaker tombé à l’eau avec une seule main, c’est impressionnant. Pouvoir avoir ses deux mains pour brasser de la toile, c’est important. Naviguer avec une seule main, cela fait appel à une capacité de survie hors du commun et une adaptation parfaite. C’est différent en termes de motricité. Vu la complexité de la course au large et des manœuvres, Damien compense par autre chose, quelque chose d’exceptionnel. Il a une intelligence différente.
Ce que réalise Damien sur ce Vendée Globe vient renforcer tout ce qu’il a déjà réalisé. Il joue au plus haut niveau dans une discipline qui compte parmi les plus dures au monde. C’est une très belle leçon de vie. »